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Haïti : Les sanctions américaines contre Fritz Jean, un coup de massue pour un pouvoir trop fracturé

  • etrof16
  • il y a 3 jours
  • 3 min de lecture

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Par Eddy Trofort


La révocation du visa de Fritz Alphonse Jean, accusé de liens avec les gangs, expose les profondes divisions qui paralysent la transition politique.


L'imposition de sanctions américaines contre Fritz Alphonse Jean, un haut responsable haïtien, agit comme un catalyseur dans la crise politique haïtienne. La révocation de son visa pour « soutien présumé aux gangs » par le Département d'État américain ne se contente pas de fragiliser la légitimité du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) ; elle cristallise des divisions internes ravageuses, notamment avec le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé. Alors que le mandat du CPT doit s'achever le 7 février 2026, cette décision assombrit encore un horizon déjà bien sombre.

 

L'annonce, faite lundi, porte un coup direct aux efforts affichés de l'Exécutif haïtien contre l'emprise des gangs. Fritz Alphonse Jean, qui avait pourtant annoncé un « budget de guerre » contre ces groupes criminels, a quitté la Villa d'Accueil avec le sentiment que le Premier ministre Fils-Aimé est le principal responsable de son échec.

 

L’Ancien Coordonnateur du CPT rejette farouchement les accusations américaines. Fritz A. Jean dénonce une forme de pression en affirmant que des diplomates américains et canadiens auraient proféré des « menaces de révocation de visa » dès que l'éventualité d'un changement de Premier ministre a été évoquée. Selon lui, son combat se résume à la lutte contre la corruption, le trafic d'armes et la capture de l'État par des intérêts criminels.

 

Cette sanction intervient dans un contexte sécuritaire catastrophique : Port-au-Prince est largement sous l'emprise de gangs qui, équipés de matériel sophistiqué, y imposent leur loi par la terreur et l'extorsion.

 

La mesure de Washington n'est pas un incident isolé, mais s'ancre dans des luttes de pouvoir préexistantes. Depuis sa nomination en novembre 2024, le Premier ministre Fils-Aimé est en conflit ouvert avec certains membres du CPT, dont Fritz Alphonse Jean.

 

Un épisode récent illustre ces tensions. Un contrat de bail portuaire de 27 ans sur le port de Port-au-Prince. M. Fritz Jean s’est publiquement opposé à ce qu'il présente comme une opération opaque, exigeant des explications du Premier ministre et soulevant de lourds soupçons de corruption, particulièrement dans une zone stratégique et volatile.

 

Parallèlement, l'ancien Gouverneur a initié un protocole, via le ministère de la Justice, pour enquêter sur les Haïtiens rapatriés des États-Unis pour liens présumés avec la criminalité. Une initiative perçue par certains comme un outil nécessaire pour assainir le secteur sécuritaire, et par d'autres comme une manœuvre pour consolider son influence face à Fils-Aimé.

 

La date du 7 février 2026, censée marquer la fin du mandat du CPT, approche dans un climat d'extrême tension. L'institution est déjà accusée par certains de manœuvrer pour prolonger son pouvoir au-delà de cette échéance, notamment en manipulant des nominations clés. L'incapacité à organiser des élections, en raison du chaos sécuritaire, mine un peu plus sa crédibilité.

 

La sanction américaine contre l'un de ses membres éminents pourrait avoir des conséquences en cascade comme l’instabilité politique accrue en augmentant la méfiance entre le CPT, le Premier ministre et les partenaires internationaux et ainsi fragiliser toute coopération.

 

Elle renforce aussi le sentiment dans la population d'une complicité entre l'État et les gangs, déstabilisant encore un pouvoir central déjà vacillant. Cette mesure américaine isole aussi le Pays en discréditant définitivement le CPT aux yeux de la communauté internationale, impatient de voir des progrès concrets vers la démocratie.

 

À l'aube de cette échéance cruciale, Haïti se trouve à un carrefour. L'affaire Fritz Alphonse Jean et son conflit avec Alix Didier Fils-Aimé sont le symptôme d'une transition politique incapable de dépasser ses divisions. Sans une unité nationale retrouvée, sans une stratégie crédible pour des élections libres et sans une lutte déterminée contre les gangs, le pays s'enfonce dans un cycle de violence et de paralysie institutionnelle.

 

La posture américaine, si elle vise à « assainir », interroge aussi sur la marge de manœuvre réelle des l’Exécutif haïtien à choisir de nouveaux dirigeants au plus haut niveau de l’Etat. Dans ce contexte, la souveraineté même de la nation est mise à l'épreuve, laissant certains se demander avec amertume et colère si Haïti peut encore tracer son propre destin.

 

Eddy Trofort

 
 
 
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