Haïti : l’absence de cadre légal alimente la montée d’un terrorisme local, selon le CARDH
- troforteddy
- il y a 23 heures
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La désignation par les États-Unis des coalitions armées Viv Ansanm et Gran Grif comme organisations terroristes étrangères constitue un signal fort de la communauté internationale, soulignant un changement majeur dans la perception de la crise sécuritaire qui ravage Haïti. Pour le Centre d’Analyse et de Recherche en Droits de l’Homme (CARDH), cette décision souligne une réalité désormais incontestable, le pays est confronté à une crise de nature terroriste, bien au-delà du cadre de la criminalité urbaine.
Dans un rapport publié quatre jours après l’annonce américaine, le CARDH dresse un tableau alarmant mentionnant que les groupes armés haïtiens fonctionnent comme de véritables entités paramilitaires, contrôlant des zones entières du territoire, imposant leur autorité aux populations, et multipliant les actes de terreur ciblés avec attaques contre des institutions publiques, incendies de commissariats, enlèvements et attaques d’hôpitaux.
Face à cette montée en radicalité, l’arsenal juridique haïtien reste insuffisant. Malgré l’adoption en 2023 d’un décret sur le financement du terrorisme, aucune loi nationale ne définit clairement ce qu’est un acte terroriste, empêchant ainsi une réponse judiciaire cohérente et dissuasive. Le CARDH juge cette carence législative comme un frein majeur à l’action de l’État.
Dans ce vide normatif, les États-Unis appliquent leur propre cadre de sanctions extraterritoriales gel d’avoirs, interdictions de transactions et poursuites judiciaires contre les complices présumés. Bien que cette approche permette d’exercer une pression internationale, le CARDH met en garde contre une vision idéologique importée, qui pourrait s’avérer contre-productive.
« En plaçant Haïti dans la même catégorie que les talibans, les FARC ou les cartels mexicains, les États-Unis appliquent une logique globale à une réalité locale complexe », précise le rapport.
L’organisation de défense des droits humains redoute que cette désignation ne radicalise davantage les groupes armés, qui pourraient chercher à s’allier avec des réseaux criminels ou jihadistes transnationaux, aggravant ainsi la crise sécuritaire et humanitaire déjà hors de contrôle.
Au cœur du problème, le CARDH pointe l’effondrement progressif des institutions haïtiennes. La police nationale est débordée, sous-équipée, et peine à répondre aux violences. Le système judiciaire est dysfonctionnel. Quant à la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), son déploiement reste timide, sans impact significatif sur le terrain.
Dans ce contexte, les groupes armés renforcent leur emprise, exploitant le vide laissé par l’État. Le CARDH avertit que si les institutions de sécurité et de justice ne sont pas rapidement reconstruites, la violence risque de devenir une réalité permanente pour les Haïtiens.
Mederson Alcindor
Haiti Press Network (HPN)