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Haïti et sa logique du faire-semblant

Commençons d’abord par le Club des neuf qu’on appelle improprement, mais par outrecuidance, Conseil présidentiel de transition (CPT). Il s’agit d’un minuscule petit groupe d’individus bénéficiant de la semi-bénédiction d’une communauté internationale fatiguée de la longue et interminable bêtise politiciennement haïtienne, qui font semblant de diriger, d’administrer, d’exécuter… Pourtant, dans le réel tangible et intangible tout est faux. À court, moyen et long terme, il n’y a aucun plan sur la table. On est dans la supercherie au quotidien, le bluff gratuit, les fausses promesses à bon marché, le tâtonnement à qui mieux mieux. D’ailleurs, l’éphémérité de la ‘’présidence’’ tournante a déjà montré que chaque CONseiller-président devenu coordonnateur du CPT détient son petit programme présidentiel personnel : l’un semblait faire de la ‘’Dette de l’Indépendance’’ une priorité, allant jusqu’à dire à la France ses quatre vérités historiques à la tribune de l’ONU. Une percée caricaturalement dessalinienne demeurée jusqu’ici sans grands effets et sans suite utile.


L’autre voulait sortir des griffes des gangs armés au moins un grand axe routier avant la fin de son court passage au je ne sais quoi présidentiel de transition. Pourtant, dans la réalité, l’empire des bandits s’est étendu jusqu’à Kenscoff, mettant ainsi Pétion-Ville, la nouvelle République d’Haïti, en état d’alerte maximale. Un autre enfin veut faire la guerre aux malfrats non par les armes et les stratégies policières ou militaires, mais par les chiffres. À défaut d’être nucléaire, la guerre est budgétaire. En dépit de ce casus belli, les criminels de ‘’Viv ansanm’’ continuent sans s’inquiéter d’accomplir leur mission : « Terroriser ! Terroriser ! Terroriser ! ».


Dans ce champ de ruines (comme à son habitude, le 47ème Président de États-Unis dirait Shitole country) qu’est devenue la Première République noire, des écoliers font semblant d’apprendre, des étudiants font semblant d’étudier, en suivant des cours… en ligne. Après tout, puisqu’ils ne se soulèvent pas contre le mal absolu qu’incarnent nos soi-disant dirigeants, comme ne l’avaient pas fait les hommes du Sud du temps de Dessalines, ils sont bien obligés, croient-ils, de se prêter au jeu suicidaire de la simulation, d’autant que les responsables des écoles et des universités feignent le fonctionnement numérique après l’envahissement et/ou la destruction de leurs établissements par les gangs armés. Après l’épuisante semaine de feinte écolière et estudiantine, vient souvent, si ce n’est toujours, l’instant de la distraction ou du plaisir simulé. ‘’Un weekend reste un weekend même dans les pays en guerre !’’ Ainsi, dans les boites de nuit, les clubs et autre lieux ludiques, jeunes femmes et jeunes hommes font semblant de goûter à ce qui donne un certain sens à leur vie. Mais, les illusions sont toujours vite, très vite, perdues, puisqu’ils portent l’angoisse existentielle et le Mal-être chevillés au corps. De même que le budget de guerre ne fait pas taire les armes de grand calibre des bandits, les jeux de reins ne font disparaître ni n’apaisent véritablement les problèmes. Bien au contraire ! Le remède n’est ni dans l’appellation ronflante ni dans les libations feintes.


À côté, jamais trop loin, toujours très proche, il y a les gangs armés. Même si ce sont eux qui dictent depuis quelque temps les lois de notre vie, dessinent ce que doit être notre réalité, leurs membres aussi sont des experts du faire-semblant. Prisonniers volontaires des territoires conquis, ils ne sont pas libres de leurs mouvements. À Martissant comme à Gressier, à Croix-des-Bouquets comme à Mirebalais…, les caïds se meuvent, s’exhibent et vocifèrent en prison dorée. Ils sont aussi captifs que nous. Comme des journalistes qui font semblant d’informer (l’essentiel de l’information s’étant, hélas, réduit à l’insécurité et les effets de l’insécurité se propagent en temps réel sur les réseaux), comme des pasteurs qui font semblant de prêcher pour sauver des âmes désespérément fatiguées, comme des parents qui, par devoir et obligation, font semblant de penser à l’avenir de leurs enfants…, les malfrats jouent aussi au jeu suicidaire de la simulation permanente. Dans l’intervalle, jamais en reste, les États-Unis emboitent le pas en feignant d’étiqueter les groupes armés de terroristes, sans daigner prendre hic et nunc les mesures qui s’imposent.


GeorGes ALLEN

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