Le sport a longtemps bénéficié de l’éloge d’une activité apolitique. La rhétorique postulée s’inscrit dans la continuité de l’humanité prônée par les philosophes des Lumières. Ainsi la discipline du football offre par excellence l’opportunité d’être saisie comme un instrument de la paix pour avoir réuni le plus grand nombre de personnes dans le monde au moyen du spectacle de la coupe du monde organisée périodiquement chaque quatre ans. En dépit de l’idéal associé au football, il reste un sport avec ses limites intrinsèques. Le sport est un outil de contrôle et de manipulation pour les pouvoirs politiques selon le sociologue Brohn cité par Pierre (2005). Le football est un sport et non un jeu qui fait plutôt substituer l’esprit à la force et abolit la violence. L’instinct combatif de l’homme serait dirigé vers des voies pacifiques. Les antagonismes sont appelés à céder la place à la démarche intellectuelle. C’est ce discours de fonds que voudrait projeter le football à travers l’égalitarisme démocratique comme compétition de tous contre tous.
La Fédération Internationale de Foot Ball Association présente un appât d’égalitarisme démocratique dans la gestion non équitable des dossiers d’adhésion à cette Fédération qui se veut respectable à sa fondation jusqu’au scandale Fifagate en l’année 2015 qui a révélé la machinerie de corruption, de prébendes et d’abus de pouvoir au sein de la FIFA. En effet, la liberté est restreinte pour certains pays sous prétexte de leur statut Non indépendant tels sont les cas de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane qui se voient leur demande d’adhésion rejetée au mépris des provisions légales de la FIFA qui a subi des pressions de la France Métropolitaine alors deux fois championne du monde de Foot Ball.
La vocation d’assimilé -assisté des collectivités contredit l’idéal d’autonomisation et d’indépendance des territoires, un poids deux mesures en lieu et place du principe d’égalité. Les entités néerlandaises non encore indépendantes comme Aruba, Bonaire, Saint Marteen et Curaçao sont toutes membres à part entière de la FIFA aussi bien que Puerto Rico , lui, depuis 1960. Le colonialisme se poursuit , dans la pratique du sport notamment du Foot Ball. Les Antilles françaises sont toutes membres de la Fédération de Volley Ball ainsi que du Hand Ball mais leur adhésion à la Fédération Internationale de Foot Ball Association a été mise à l’écart . Il a été stipulé dans l’article 11.6 de la Charte de la FIFA : »avec l’autorisation de l’association membre du pays dont elle dépend , une association d’une région n’ayant pas encore obtenu l’indépendance peut également demander l’admission à la FIFA ».
Voilà une velléité coloniale dans le foot ball exercée par la France en limitant la liberté des Associations pendant que l’article 19 de la charte indique : » chaque association membre doit diriger ses affaires en toute indépendance sans l’influence inclue d’aucun tiers ». Aussi l’article 15 de la FIFA a été violé par la France à savoir : ». Les associations membres doivent rester neutres en matière de politique et de religion. Elles doivent garantir l’indépendance et éviter toutes formes d’interférence politique ». Ce qui survint dans le cas de la demande d’adhésion de la Fédération de Foot Ball de Martinique quand s’interpose le ministère des Sports de la France. Ce qui n’a été nullement le cas de la nouvelle Calédonie non indépendante ni de Tayiti .
Le football en tout temps tient lieu de paravent à la politique masquée quand les antagonismes ne sont pas encore à nu. Ainsi on a vu la FIFA exclut la Russie du Mondial 2022.On n’a pas vu exercer aucune pression sur l’Angleterre lors de la Guerre des Malouines , territoire revendiqué par l’Argentine , en 1978.
Le Foot bal peut servir d’autres causes comme les exploits de régimes fascistes et autoritaires pour se refaire une image internationale. L’Italie Fasciste s’y rangea, l’Allemagne ainsi que le Brésil des dictateurs des années 1960.Haiti des Duvalier de 1974 avait aussi marqué le pas. L’idéal de paix du foot ball n’est pas toujours de la partie même s’il est utilisé au Congo en 1969 puis en Haïti en 2004 sous l’égide du Brésil dans un match pour la paix.
Le Foot sert aussi à faire la guerre en se rappelant « la guerre du foot ball « entre le Honduras et El Salvador en 1969 (Denis :2018, 385).Ce fut un conflit qui avait opposé en juillet 1969 ces deux pays suite à un match éliminatoire de la coupe du monde prévue au Mexique en 1970.El Salvador a été lésé dans ses intérêts pour avoir été victime des perturbations politiques en Honduras en lien à la défaite de l’équipe Salvadorienne dont les joueurs ont été épuisés par manque de sommeil. Ce point peut être documenté par tout intéressé, nous n’avons fait état que d’un simple aperçu de l’évènement en question.
Le Foot ball n’est exempt des influences politiques en dépit du principe d’égalitarisme démocratique promu par la FIFA. Comment apprécier les retenues des autorités du Quatar à la diversité face aux restrictions au LGBT entre autres en termes de pleine participation et liberté individuelle ?
Pour clore provisoirement cet épisode sur la politisation du Foot ball, nous attirons l’attention sur la subalternisation de la Fédération Haïtienne de Foot Ball Haïtien au board de la FIFA alors qu’Haïti est parmi les membres fondateurs de cette Fédération Internationale. En effet, en date du 11 novembre 2022, le cubain Luis Hernandez a été nommé président du comité de normalisation de la Fédération Haïtienne de Foot Ball qui ne peut encore surmonter une crise de gouvernance.
Hancy Pierre, Professeur à l’Université
Repères Bibliographiques
Hancy Pierre, « le match Haiti-Bresil : les 7 tirs et buts du Brésil , Etats Unis de l’Amérique du sud », in le Nouvelliste, Port-au-Prince, 22 mars 2005.
Yves -Leopold Monthieux, » FIFA :la nouvelle Marotte Martiniquaise », 28 septembre 2016
« Adhésion à la FIFA : le premier ministre ne fera rien pour la Martinique », par BDLS et Christian Boutrin 15/08/2020-Article en ligne. Consulté le 19 novembre 2022.
Watson Denis, Haïti, la CARICOM et la Caraïbe. Questions d’économie politique, d’intégration économique et de relations internationales, C3 Editions, Port-au Prince, 2018.
Raymond Thomas et autres, Le Football, Collection Que Sais-je ? Presses Universitaires de France, France, mai 1991.
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