Les rues de Solino, un quartier de Port-au-Prince, ont été le théâtre d’une explosion de colère ce lundi 19 août 2024, alors que des centaines de résidents se sont rassemblés pour protester contre une violence insupportable et une insécurité omniprésente. La manifestation initialement pacifique, destinée à exprimer le désespoir croissant de la communauté, a été réprimée par les forces de l’ordre qui ont eu recours aux gaz lacrymogènes pour disperser les participants. Depuis la déclaration de l’état d’urgence sécuritaire dans plusieurs départements du pays il y a environ 2 mois, les manifestations à caractère subversif sont interdites par le gouvernement.
Cette vague de colère fait suite à une attaque tragique survenue le 15 août, orchestrée par les gangs dirigés par Jimmy Chérizier, alias Barbecue. L’offensive a non seulement coûté la vie à un policier mais a également blessé plusieurs civils et détruit de nombreuses maisons. Les témoignages des résidents peignent un tableau sombre de leur quotidien : une vie marquée par la peur constante, avec des attaques répétées par des groupes criminels de plus en plus audacieux et confiants. Cette confiance se renforce en raison du manque d’action efficace de la PNH face aux bandits qui continuent de s’emparer de territoires sous leur contrôle.
Le mécontentement des habitants de Solino est accentué par l’attente prolongée d’une intervention internationale, dont l’arrivée n’a pratiquement pas changé la situation. Depuis le 25 juin 2024, le premier contingent de la force multinationale, composé de kenyans, a été déployé sur le sol haïtien dans le but de stabiliser la situation. Cependant, malgré la présence de ces troupes, les efforts de sécurisation semblent insuffisants, laissant la population frustrée et désillusionnée. L’inefficacité apparente de cette intervention internationale contribue à l’exaspération croissante parmi les résidents, qui espèrent désespérément des actions concrètes et visibles pour restaurer la paix.
Cette manifestation coïncide avec la Journée mondiale de l’aide humanitaire, soulignant l’urgence de la situation humanitaire en Haïti. Près de la moitié de la population haïtienne est confrontée à une crise alimentaire aiguë, exacerbée par l’inflation galopante et la violence des gangs. La défaillance des réponses internationales face à cette crise humanitaire accentue le sentiment d’abandon parmi les citoyens.
La répression de la manifestation de Solino met en lumière la profonde crise de gouvernance et d’assistance humanitaire qui frappe le pays. Les habitants, épuisés par des mois de violence et de négligence, appellent désormais à une action d’envergure, capable non seulement de sécuriser la région métropolitaine de Port-au-Prince, mais aussi de répondre aux défis humanitaires pressants. La situation à Solino comme dans d’autres quartiers tels que Nazon, Carrefour-Feuille et tout le bas de Delmas, illustre les défis complexes auxquels le pays est confronté, et souligne l’impératif d’une réponse internationale plus efficace et coordonnée pour alléger la souffrance de millions de citoyens.
Marvens Pierre
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