Haïti occupe actuellement la tête du peloton des sociétés victimes de la fuite massive des cerveaux et des capitaux, selon la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED), estimant que parmi les Haïtiens les mieux formés, plus de huit sur dix résident actuellement à l’étranger. Cette fuite se situe amplement au-dessus du seuil optimal de 5% à 10% soutenu par des analyses sur la migration des travailleurs qualifiés.
Cette érosion des professionnels haïtiens s'explique par la dégradation de l’environnement sécuritaire et sociopolitique du pays. Bon nombre de compétences ont fui le pays en raison de la prolifération des gangs armés dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince procédant aux kidnappings, aux viols et aux meurtres. Ils exigent de fortes rançons en échange de la libération des victimes, une pratique qui appauvrit les professionnels ces trois dernières années.
Tantôt des fusillades comme celle enregistrée à Carrefour-feuilles où 2 policiers ont été tués, mardi 10 janvier, lors d’un contrôle de routine sur une voiture, non loin de l’église Wesleyenne. Selon Lionel Lazarre, Coordonnateur national du syndicat de police (SYNAPOHA), ce sont les occupants de la voiture en question qui ont abattu Dempsey Denis, agent I de la 27e promotion de police et Daddy Prévilus, lui aussi agent I, issu de la 31e promotion. Leurs armes de service ont été emportées par les malfrats, selon des témoins de la scène. Les victimes étaient affectées au sous-commissariat de Marché Salomon, d’après le porte-parole de la PNH, le Commissaire divisionnaire Garry Desrosiers.
Autre exemple, celui de l’ingénieur Malonne Ossé Léger qui a dû quitter le pays fin décembre dernier, suite à des menaces proférées contre sa personne depuis plusieurs mois. L’une de ses proches a été kidnappée à proximité de sa résidence, et dans la nuit du 14 au 15 décembre 2022, des bandits armés ont fait irruption chez lui dans la zone de Montagne Noire où de nombreux dégâts ont été enregistrés. Après plus de dix ans d’engagement dans la coopération internationale, elle a dû se réfugier aux Etats-Unis, espérant pouvoir retourner dans son pays pour continuer son travail au sein de la délégation de l'Union européenne.
Actuellement le Québec fait face à un grand nombre de demandeurs d’asile, particulièrement des Haïtiens. Fuyant la violence des gangs et la crise multiforme qui paralyse Haïti. Ils sont nombreux à traverser une dizaine de pays avant d’entrer au Canada par une brèche à la frontière. Avec près de 2 400 dossiers en 2022 au Québec, les Haïtiens forment le plus grand groupe de demandeurs d’asile, largement devant les Mexicains et les Colombiens. La plupart aboutissent à Montréal où ils se retrouvent confrontés à des structures d’accueil saturées Tous pays confondus, une personne sur deux obtient le statut de réfugié au Canada, mais le processus ardu peut prendre deux ans. Les demandeurs d’asile doivent prouver que leur vie est directement menacée dans leur pays.
Autre exemple atypique, regardons les affluences constatées au niveau des Services de l'immigration et de l'émigration, suite à l’annonce du programme « Humanitarian parole » du gouvernement américain, lancé le 5 janvier dernier. Ledit programme doit accueillir par mois 30 mille citoyens d’Haïti, du Nicaragua, du Venezuela et de Cuba, a annoncé le président américain Joe Biden. Preuve évidente que les haïtiens sont fatigués avec leur propre pays… comment arrêter cette hémorragie ? L'avenir parait pour le moment incertain.
YPL/HPN
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